monotarcie

j'ai intitulé mon blog "monotarcie" (mon autarcie) au sens que j'y décris mes expériences, afin de les partager, mais aussi de garder pour mon usage personnel une sorte de "calendrier perpétuel" de ce que je fais... les saisons étant toujours différentes, je peux consulter mes activités des années précédentes à la même époque, par exemple...

cela me permet aussi de revoir, en plus de la nature omniprésente autour de moi, des photos que j'aime bien et qui, sinon, finiraient aux oubliettes.

c'est la magie du Net et du numérique que tout cela car il n'y a pas si longtemps çà n'existait carrément pas. les photos étaient faites au compte-goutte - pour des raisons financières - et il fallait attendre une semaine avant d'avoir le résultat de son dernier film de diapositives de 36 poses... aujourd'hui la photo est devenue quasi instantanée et sans limites, tout comme les échanges écrits ou parlés : de la magie, en somme... : l'Humain l'a rêvé, l'Humain l'a fait...

comme pour tout ce qui est magique... il y a un petit hic et la baguette magique est probablement "à durée limitée" : en y regardant de plus près, toute la technologie et l'évolution faite ces dernières décennies sont étroitement liées à l'énergie disponible facilement et à volonté qu'est le pétrole. le pétrole étant épuisable, vu sur une échelle plus longue, l'époque moderne est une "parenthèse industrielle et technologique" qui durera probablement le temps d'une allumette... une aventure d'environ un siècle ou peut-être deux... on verra bien...
ce qui m'intéresse alors, c'est d'étudier et d'expérimenter en pratique la "posthistoire"... c'est à dire notre futur qui viendra après la préhistoire suivie de l'Histoire... :-)

mon intérêt pour l'autarcie est donc essentiellement motivé par le côté agréable et intéressant d'un mode de vie proche de la nature... (un sujet qui me passionne depuis mon enfance), mais aussi par la curiosité, l'envie de savoir comment l'humain pourrait ou pourra faire au mieux si jamais il n'est plus motorisé... 
j'ai tendance à penser qu'il ne s'en portera pas plus mal (même si dans un monde moderne c'est difficile à imaginer) il s'en portera peut-être même mieux s'il arrive à s'organiser et faire le tri : conserver et développer les avantages intéressants, éviter là où c'est possible, les inconvénients. cela me semble tout à fait faisable, compte tenu de l'aspect et des conditions d'un "nouveau décor" le moment venu. je vois çà un peu comme si l'on changeait de plateau lors d'une pièce de théâtre, pour passer à l'acte suivant... un autre monde, sans la magie du pétrole, fait parfois peur... mais il suffit d'une génération pour que l'on trouve "normal" un monde de nouveau "à pied et à main"...

si on laisse de côté l'argument de la fin du pétrole tôt ou tard, (car tout le monde n'y croit pas) l'autarcie, c'est à dire faire soi-même, est le seul et meilleur moyen de faire une traçabilité efficace de sa consommation : destructions et exploitations humaines et animales, par exemple, ne sont pas faites "par procuration", ("loin des yeux, loin du coeur")... et les excès sont limités puisqu'ils sont fonction de notre effort individuel...

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autarcie individuelle...
je vois encore un autre intérêt à la notion d'autarcie... individuelle (et il n'est pas du tout nécessaire de devenir un ermite pour cela) : des "éléments doués d'autarcie individuelle" peuvent plus facilement se regrouper dans un fonctionnement collectif car ils ne seront pas dépendants les uns des autres, ne mettant ainsi pas l'autre abusivement à contribution, voire évitant l'exploitation de l'autre et les tensions qui s'en suivent...
je pense que la plupart des échecs lors de tentatives d'un mode de vie communautaire proviennent du fait que se rassemblent des personnes qui vont être interdépendantes alors qu'un système qui rassemblerait des éléments indépendants (aimant et sachant fonctionner de façon autonome - question de savoir-faire mais surtout aussi d'état d'esprit) va fonctionner de façon très différente avec bien moins de tensions, moins de risques de pannes, et plus d'efficacité.
en ce sens l'apprentissage et l'exercice de l'autarcie individuelle (une forme d'autodiscipline) est une sorte de "formation préalable à la vie communautaire ou collective".


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tentative d'autarcie...
pour ce qui est de mon autarcie en pratique, je précise encore que je ne vis pas en autarcie comme pourrait parfois le faire croire mon blog - j'en suis loin et contraint d'acheter beaucoup de choses... (une autarcie efficace et agréable doit être bien rodée depuis des générations), ma démarche est plutôt celle de m'y intéresser de près et d'essayer de m'en approcher, de "faire comme si" pour voir "comment on fait" et ce que cela donnerait dans une vie quotidienne. je ne suis qu'un "quidam" qui essaie, par choix, et parce que cela lui paît, de vivre au mieux là où il se trouve, dans une sorte de colocation respectueuse avec les éléments de la nature qui m'entourent, plantes et animaux...

de nombreux handicaps font que je suis loin de l'autarcie : plantations de vergers trop récentes, zone froide et humide (terrain acide en fond de vallée : en situation réelle il faudrait s'étendre un peu plus à côté). le site que j'habite a seulement été choisi il y a des siècles non pas pour y faire de l'agriculture, mais parce que c'était le seul gros ruisseau près du bourg, en fond de vallée, où l'on puisse mettre un moulin hydraulique à huile ou à grain... pas très pratique pour cultiver... en cas de nécessité je reverrais donc pas mal ma copie et essaierais de déplacer certaines activités un espace plus loin, plus au sec et au soleil... en terrain plus propice...
les zones agricoles se trouvent plus en hauteur, sur le plateau, nos fonds de vallée froids et humides étant à l'époque habités par des bûcherons, charbonniers, verriers, etc... qui exerçaient leur activité à cet endroit-là...


quelques mots, encore, pour expliquer mes réticences pour recevoir des visiteurs, car je suis assez régulièrement sollicité (y compris par des médias) :
et je suis toujours embarrassé lorsqu'on me demande, car je voudrais essayer de ne pas cautionner des déplacements non indispensables : "produire et consommer local" veut également dire, pour moi, se déplacer local... même de préférence, ne pas se déplacer... autrement qu'à pied... je "boycotte" pour ainsi dire les déplacements motorisés roulants et volants non indispensables... pour des raisons écologiques, mais aussi éthiques...

surtout que le Net et l'ordinateur permettent aujourd'hui de communiquer très facilement à volonté, et pratiquement de se déplacer sans avoir à se déplacer...

il y a aussi le fait que dans le monde moderne on a tendance à se rencontrer et/ou faire des vacances alors que c'est la pleine saison des activités de production... et cela n'est pas très pratique... surtout que les propositions peuvent être fréquentes...
enfin et surtout, je l'avoue... personnellement je ne suis pas très à l'aise en présence de gens que je ne connais pas, mais je le suis tout à fait avec les gens de mon entourage, avec lesquels j'ai l'habitude d'échanger...


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à propos du lieu...

pour nous situer à peu près : un fond de vallée dans les Vosges du nord (au nord de la petite ville de Phalsbourg) ; il y a mieux du point de vue du climat puisqu'il fait frais voire froid longtemps, et humide. à l'origine l'endroit était moins destiné à l'agriculture car il y a quelques siècles c'était un moulin à grain, transformé ensuite en scierie sur l'un des gros ruisseaux se trouvant à une dizaine de km d'un gros bourg...

le sol est plutôt acide et humide (carex, reine des prés, scirpes) et la forêt variée... (hêtres, épicéas, fougères....) avec de nombreux rochers de grès rose.

le moulin à grain est devenu scierie il y a plus d'un siècle...  actionnée au moyen d'une roue à aube, puis plus tard par un moteur diesel et enfin par l'énergie électrique... (le débit du ruisseau ayant trop fortement diminué au fil des années). les petites scieries n'étant plus très rentables les propriétaires ont cessé leurs activités et mis l'ensemble en vente...

c'est à ce moment que nous sommes arrivés... (il y a un peu plus d'une vingtaine d'années, à présent).
la propriété comprend une grande maison, deux grands hangars industriels d'une vingtaine de mètres de long chacun (en fort mauvais état, mais retapés entretemps), et un terrain de trois hectares, dont un de forêt...
l'ensemble était en vente depuis environ deux trois ans et avait des difficultés à trouver acquéreur : maison trop isolée, seule en plein milieu de 3 à 4 km de forêt...  devenue peu hospitalière, les vitres des fenêtres ayant pratiquement toutes été cassées, et les portes intérieures et extérieures... volées... en raison d'une longue période d'abandon et d'inhabitation...

il n'était pas simple de rendre progressivement une partie des terres cultivables : certains terrains, notamment ceux proches de la maison, ont été remblayés pour manipuler les grumes qui y étaient parqués pour être sciés ensuite... alors que des terres plus en aval était à l'inverse nettement marécageuses...


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quelques images...


une carte postale datant de 1901 (retrouvée par la secrétaire de mairie) : à cette époque la maison abritait aussi... un café ou buvette "A l'aigle"... il avait pas mal de succès en belle saison, l'endroit étant un point d'excursion le dimanche pour les villageois des environs : situé dans une belle nature on faisait quatre kilomètres à pied, en famille, pour aller boire un pot... (les trois villages qui nous entourent sont situés à peu près à cette distance). le café a cessé de fonctionner probablement lorsque la scierie a pris de l'ampleur : de nombreux anciens nous racontent fréquemment être venus, enfants, seuls ou avec leurs parents, durant leurs jeudis ou leurs dimanches... pour y regarder l'activité du lieu...
la grange de droite a aujourd'hui disparu car les grumiers modernes n'arrivaient pas bien à passer dans l'espace devenu trop étroit, au milieu, entre les bâtiments...

et la même aujourd'hui (19/12/2011) avec la neige de ce matin...



on voit ci-dessus les deux hangars dans le prolongement l'un de l'autre : les troncs entraient par le pignon, devant, du premier hall, pour être sciés et les poutres ou planches ressortaient sur des wagonnets par le hangar tout au fond...
aujourd'hui les hangars nous servent de grange à foin, d'écurie... de débarras et de garage...

et voici en été...